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Marketing

Qu’est-ce que le washing, et pourquoi vous voulez l’éviter ?

Vous avez déjà probablement entendu parler de greenwashing. Mais quid du purple washing ? Ou du pink washing ? Décryptons ces termes qui font le washing, et comprenons ce qui les distingue du marketing éthique.

Une illustration des divinités de l’emailing célébrant la diversité

Un géant de l’automobile thermique qui se positionne comme acteur de l’environnement... Une grande marque de cigarettes qui fait de l’éducation sur la santé et le bien-être... Ça vous perturbe ? C’est normal ! Car l’image des marques évolue et va changer pour rester dans l’air du temps. En ce sens, elles sont un miroir de notre société.

Porter des chaussures de la marque Veja tout en arborant un tote bag griffé du logo Greenpeace et en sirotant votre bubble tea avec une paille en métal et une écocup en dira autant sur votre style que sur votre mode de vie.

En faisant le choix – parfois osé comme avec les deux exemples susmentionnés – d’adopter une communication progressiste, les entreprises prennent un risque : si cette communication n’est pas suivie d’effets, on considèrera que la marque fait du washing.

Comment éviter cela ? Dans cet article, nous passons en revue différents types de washing, avant d’analyser et d’illustrer ce qui le différencie du marketing éthique. Car si la frontière entre ces deux champs du marketing est mince, elle est également très claire.

Qu’est-ce que le washing ? Définition et typologie

La notion de washing – ou blanchiment – n’est pas apparue spontanément. Elle est la combinaison de plusieurs types de washings comme le greenwashing ou le purple washing. Le washing désigne donc le fait d’altérer son image positivement pour générer un profit, sans pour autant changer fondamentalement le fonctionnement même de l’entreprise. Généralement, le pot aux roses est rapidement découvert, et l’impact sur l’image de l’entreprise est bien souvent négatif. Découvrons différents types de washing.

Qu’est-ce que le greenwashing ?

Le greenwashing est probablement le washing le plus connu, puisqu’identifié depuis les années 1980 : suite aux chocs pétroliers, certaines marques se sont rendues compte que non seulement leurs consommateurs commençaient à se détourner des énergies fossiles en faveur d’alternatives moins onéreuses. En outre, l’écologie politique, jusqu’ici considérée comme un sujet marginal pour nostalgiques du Larzac, commençait à gagner du terrain.

Concrètement, dans le monde du marketing, cela s’est traduit par exemple par des marques de lessive abandonnant leurs discours sur prouesses de chimie nécessaires au développement de leurs produits ou des enzymes gloutons qu’elles contenaient, pour réorienter leur communication vers la quantité d’intrants d’origine naturelle qui les composaient. Vous l’aurez compris, c’est le début du greenwashing.

Concrètement, le greenwashing a lieu lorsqu’une marque met en avant des messages à caractère écologique pour redorer son image ou en tirer profit, alors même qu’elle agit finalement peu en faveur de la planète. Nous avions d’ailleurs déjà traité de la question dans un article sur le marketing responsable.

Le greenwashing, ou éco-blanchiement, est une technique de marketing. Elle a lieu lorsqu’une entreprise se donne une image écologique dans sa communication, alors que dans les faits elle continue d’avoir des pratiques peut respectueuses de l’environnement.

Qu’est-ce que le washing féministe ?

Si le greenwashing est la forme de washing la plus connue, bien d’autres « blanchiments de valeurs » existent. À commencer par la forme de discrimination probablement la plus ancienne : la discrimination liée au genre.

Aussi, il arrive que les entreprises se donnent une image progressiste en faisant la promotion de l’égalité femmes-hommes au travail, alors qu’aucune mesure forte comme une grille salariale fixe transparente (car les femmes ont tendance à demander des augmentations moins importantes, conduisant à toujours plus d’écarts salariaux entre hommes et femmes à postes équivalents) ou encore la mise en place de programmes pour que les femmes puissent accéder à des fonctions d’encadrement supérieures n’a été prise. On parle alors de washing féministe.

Ce phénomène, également appelé purple washing (le violet étant une des couleurs de l’union sociale et politique des femmes, une des premières organisations féministes), se traduit peut-être le plus lorsque l’on atteint les cercles dirigeants des entreprises, où les femmes restent largement minoritaires, victimes du fameux plafond de verre.

On parle de washing féministe lorsqu’une marque se donne une image paritaire, en faveur de l’égalite femmes-hommes et mettant en avant des figures féminines, alors qu’elle reste essentiellement dirigée par des hommes.

Qu’est-ce que le diversity washing ?

Une autre des injustices sociales les plus visibles est le racisme. À cela on peut également associer la xénophobie, l’antisémitisme et l’islamophobie, soit toutes formes de rejets de l’autre en raison de son appartenance ethnique, culturelle, ou religieuse.

Conscientes que ces fléaux persistent toujours aujourd’hui, certaines entreprises peuvent se donner une image positive et progressive en intégrant à leur communication des personnes d’origines différentes, soulignant leur inclusivité. Cependant, si dans les faits, ces entreprises n'affichent qu’une diversité de façade, avec pas ou peu d’employé·es venant d’horizons différents au sein de leurs équipes, ou a minima une équipe réfléchissant à la diversité, à l’équité et à l’inclusion, on peut alors parler de diversity washing.

Depuis longtemps scruté par les organisations antiracistes, mais également de plus en plus décrié par le grand public depuis la médiatisation de grands mouvements comme Black Lives Matter ou Stop Asian Hate, le diversity washing est surtout vu comme un moyen pour les marques qui le pratiquent de se donner une image inclusive en faisant peu voire pas d’effort (par exemple en maintenant un plafond de verre à l’encontre des personnes dites de couleur), tout en maintenant un statu quo où les personnes issues de minorités ethniques ou religieuses n’ont pas de place dans l’entreprise voire dans la société.

On parle de diversity washing lorsque des entreprises font appel à des porte-paroles issu·es de minorités alors même que ce rôle n’est que cosmétique, et que ces porte-paroles ont finalement peu de poids dans les prises de décisions de l’entreprise.

Qu’est-ce que le queer washing ?

De la même façon le diversity washing touche les minorités ethniques, le queer washing cherche à s’attirer les faveurs des minorités sexuelles. Également appelé pink washing ou rainbow washing, il consiste en l’appropriation de valeurs et d’imageries habituellement associées aux communautés LGBTQIA+ par des organisations publiques (États, villes, associations) comme par des entreprises privées.

Peindre des passages piétons ou des escaliers aux couleurs du rainbow flag alors que les structures publiques ne prennent autrement aucune mesure forte contre les violences faites aux personnes queers, ou faire du mois des fiertés une occasion de faire de la communication d’entreprise sans soutien réel aux associations de défense des droits LGBTQIA+ sont parmi les exemples les plus visibles de queer washing.

Le queer washing a lieu lorsqu’une entreprise s’empare de questions LGBTQIA+ à des fins purement promotionnelles, sans implication spécifique dans la défense des droits des personnes concernées. Ces communications passent par exemple par l’utilisation de codes visuels ou la mise en scène de personnes LGBTQIA+ dans leurs campagnes.

Quand le marketing éthique plonge dans le washing

Nous avons défini les formes de washing les plus communes – tout en sachant qu’il en existe de nombreuses autres formes. Il faut maintenant comprendre comment ce qui part, à moins d’être cynique, d’un bon sentiment peut rapidement basculer dans l’appropriation.

Car le marketing éthique a du bon. Comme nous l’avons dit en introduction, en reconnaissant l’existence de certaines causes et en les rendant publiques par le biais d’actions marketing, les entreprises diffusent et participent à la médiatisation de problèmes sociétaux et d’inégalités. La dénonciation du sexisme, du racisme, de l’homophobie, du validisme... peuvent être des évidences pour certain·es. Mais ça va toujours mieux quand on les pointe clairement du doigt. Les entreprises étant par essence des regroupements humains, elles ont un poids qu’une somme d’individus non-organisés ne possède pas, et peuvent donc par là même servir de chambre d’écho.

Capture d’écran tirée d’une campagne de Patagonia en faveur de la grève pour le climat.

La campagne de Patagonia ci-dessus donne la parole à plusieurs jeunes gens expliquant leurs raisons pour participer à la grève étudiante pour le climat. Cliquez pour voir la vidéo.

En outre, la concurrence entre entreprises peut également jouer en faveur du marketing éthique. Imaginons qu’une société proposant des services d’emailing mettent en place des programmes promouvant la baisse de consommation énergétique des envois de courriers électroniques. Cela lui donnera une image positive et pourra même servir d’argument commercial.

On peut facilement envisager que ses concurrents adopteront un comportement similaire, proposant eux aussi des programmes visant à rendre l’emailing plus vert. Un cercle vertueux se met alors en place, entraîné par le sentiment de concurrence, qui en retour mène à une industrie de l’emailing dans son ensemble plus consciente écologiquement.

Cependant, le marketing éthique doit s’accompagner non seulement d’actions visibles, mais également mesurables et publiques. Car on ne peut pas se reposer sur de simples déclarations. Et si la parole n’est pas accompagnée de gestes forts et durables, alors on tombe dans le washing.

Ce jeu d’équilibriste est délicat. Vous devez pouvoir communiquer clairement sur vos actions éthiques sans non plus trop en faire. Si vos déclarations d’engagements éthiques ne sont pas suivies d’effets, cela signifie que vous avez fait de fausses promesses. Or, mentir à son public est rarement bien perçu. Vous avez aussi les cas où les entreprises communiquent trop sur leurs engagements. Cette stratégie va vite paraître suspicieuse : que voulez-vous mettre en avant ? La cause que vous défendez, ou le bénéfice d’image que votre entreprise reçoit en soutenant cette cause ?

Marketing éthique : ce qu’il faut faire et ne pas faire

Il y a donc un code de conduite à respecter si vous ne voulez pas tomber dans le washing. Vous devez vous souvenir que le marketing éthique est d’abord au service de la cause, pas de votre entreprise. C’est pourquoi il est essentiel de suivre certaines grandes lignes directrices.

Notez par ailleurs que les points que nous allons lister sont loin d’être exhaustifs. Chaque cause a ses caractéristiques propres, et nous vous invitons à consulter les personnes directement concernées par la ou les causes que votre entreprise veut défendre pour savoir comment les soutenir au mieux.

Offrez des preuves quantifiables de vos actions

Comme pour toute activité de marketing, l’impact d’une campagne éthique se mesure d’abord avec des données solides fiables. Cela peut être un volume de dons levés auprès des employés, le nombre d’heure de volontariat auprès d’un centre d’aide ou d’un refuge, des signatures d’engagement ou de sensibilisation à une cause... Vous devez pouvoir prouver concrètement que votre message s’accompagne d’action.

max_havelaar

Le label Max Havelaar est un des principaux champions des petits producteurs. L’organisation publie régulièrement les résultats de ses actions.

En outre, votre action doit avoir un impact positif immédiat pour la cause soutenue. Par exemple, si votre entreprise s’engage dans la lutte contre la déforestation, outre le fait de travailler et de financer des associations qui agissent directement sur le terrain en faveur de cette cause, il sera également pertinent de ne plus travailler avec des prestataires actifs dans le domaine de la déforestation, par exemple.

Plutôt que compenser, anticipez et agissez le plus possible à la source. La compensation carbone est un bon exemple. C’est un bon point de départ pour limiter les effets des gaz à effet de serre. Cependant, pour aller plus loin, les entreprises doivent comprendre les causes qu’elles défendent, en participant à l’éradication du problème.

Appliquez les valeurs défendues à votre entreprise

Il peut aller de soi que dès lors qu’une entreprise se prononce en faveur de l’égalité femmes-hommes ou de plus de diversité, elle applique elle-même ces préceptes à son fonctionnement. Cependant, c’est loin d’être toujours le cas.

Certes, mettre en avant des personnes aux parcours et origines différents dans ses campagnes peut avoir un impact sur la perception du public et sur les représentations. Cependant, il faut également balayer devant sa porte.

Accenture a mis en place une série de programmes et de politiques internes afin de favoriser l’accès de postes managériaux aux femmes.

Travailler avec votre département des ressources humaines pour intégrer plus d’égalité et de diversité au sein de l’entreprise. Par exemple, lors des recrutements, est-ce que les personnes faisant passer les entretiens appartiennent à un milieu socio-économique uniforme ? Quid des profils des personnes candidatant ?

C’est un travail de longue haleine, mais qui sera bénéfique pour vos équipes. Car des équipes plus diverses signifie également des produits et services plus aboutis, étudiés depuis différentes perspectives.

Prenez des risques

La défense de la justice sociale est loin d’être une tâche simple et consensuelle. La défense de certains groupes humains peut aller à l’encontre des principes d’autres groupes humains. Bref : la défense de certaines causes ne fera pas consensus. Vous devez vous préparer à cela.

Il arrive régulièrement qu’à l’occasion de célébrations en faveur des personnes LGBTQIA+, les images de profils d’entreprises se parent des couleurs du rainbow flag, en soutien aux minorités sexuelles. Or, dans de nombreux cas, ces changements cosmétiques ne se font que dans des géographies où les droits des personnes LGBTQIA+ sont reconnus, alors que les comptes à l’attention des pays pénalisant toujours l’homosexualité restent inchangés.

Encore une fois, il s’agit d’un maintien de statu quo, n’ayant d’autre but que de renvoyer une image progressiste de la marque, qui ne prend pas de risque en communiquant auprès d’un public déjà – en principe – acquis à la cause défendue.

A contrario, un marketing éthique efficace prendra des risques et mettra en avant ses idées de façon globale, quitte à froisser une partie de son public. Ainsi, à l’occasion de la journée internationale contre la LGBTI-phobie dans le sport qui a lieu tous les 19 février, le club de football du FC Barcelone a fait la promotion de son engagement contre les discriminations liées à la sexualité sur l’ensemble de ses comptes sociaux.

Capture d’écran de différents tweets du FC Barcelona contre la LGBTI-phobie.

Le FC Barcelona rappelle son engagement contre la LGBTI-phobie dans les différentes langues de ses comptes sociaux.

S’engager pour une cause, c’est l’embrasser entièrement, et pas seulement lorsque cela nous arrange. Au contraire, si une entreprise souhaite soutenir une cause, du fait de sa reconnaissance et de sa portée médiatique, elle peut participer à sa normalisation. Certes, il y a un risque de pertes de revenus sur certains marchés. Mais gardez en tête qu’une entreprise aura toujours moins à perdre que les personnes directement concernées par la cause défendue.

Restez humble

Enfin, un marketing éthique efficace devrait quasiment être imperceptible. Est-ce que dans la vie de tous les jours vous voulez qu’on vous félicite parce que vous vous êtes comporté comme un être humain décent ? Ca serait un peu embarrassant, non ? Eh bien c’est la même chose pour les entreprises.

Évidemment, vous pouvez communiquer sur vos actions – en toute transparence. Mais n’oubliez pas que dans ce cas-là, la star, c’est la cause, pas l’entreprise.

Olivier Gantois est co-CEO de Tree-Nation, une organisation qui travaille avec d’autres entreprises cherchant à avoir un impact positif sur l’environnement, grâce à la compensation carbone. Tree-Nation sait que sa mission est essentielle pour la planète et travaille donc avec des entreprises vraiment engagées dans la réduction des émissions de CO2, plutôt que se servir de ces initiatives vertes à des fins purement marketing. Il explique l’importance de ces engagements en ces termes :

Nous sommes conscients de la pratique du greenwashing et nous avons une règle simple et efficace : « Ne dépensez pas plus pour communiquer sur vos activités de plantation d’arbres que ce que vous dépensez pour planter les arbres. » Nous encourageons les entreprises à être transparentes et authentiques dans leurs pratiques de durabilité environnementale et à investir dans des projets concrets de reforestation plutôt que de dépenser des sommes excessives pour la publicité.

Olivier Gantois, co-CEO de Tree Nation

Quelques réflexions finales à garder en tête

Vous l’aurez compris, si la frontière entre marketing éthique et washing est mince, le basculement du premier vers le deuxième n’est pas une fatalité. Votre entreprise ne peut de toute façon pas prendre à bras le corps toutes les causes du monde. D'ailleurs, avant de lancer votre entreprise dans une cause, demandez à vos employé·es ce qu’ils et elles en pensent. Vous pourrez ainsi mieux identifier les combats qui correspondent à votre marque. La mise en place d’une politique de responsabilité sociale et environnementale (RSE) peut également être un premier pas.

En outre, le marketing éthique n’est pas quelque chose de ponctuel. Pour avoir un impact, il doit se faire sur le long terme, et prendre compte des évolutions de la société. Car ce qui était acceptable il y a à peine quelques décennies peut aujourd’hui être intolérable. Inversement, des comportements jugés révoltants il y a quelques années sont désormais admis. Pour que le message qui accompagne vos actions et votre marketing éthique reste pertinent, vous devez donc suivre ces évolutions.

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